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Parole aux personnes adoptées

Découvrez un extrait du Bulletin mensuel publié par le Centre International de Référence pour les droits de l'enfant privé de famille-SSI N°235 de Septembre 2019


Chaque année je rencontre de nombreuses personnes adoptées qui souhaitent s’engager dans cette fameuse « quête des origines », un cap important, voir essentiel, pour évoluer pleinement vers une autonomie sereinement assumée. Cette maturation ébranle cependant parfois l’équilibre familial. Certaines personnes en espèrent une renaissance, d’autres des retrouvailles avec leur culture, ou encore un pays. Pour la plupart, c’est le voyage indispensable pour amorcer une nouvelle vie, toucher un équilibre retrouvé. Dans son nouveau livre, Rebecca Payot pose un regard sur les émotions, sentiments et ressentis de tous, le « voyageur » lui-même et ceux qui l’entourent.


La quête des origines : Un remède miracle pour les maux de l’adopté ?


Rebecca Payot, adoptée en Éthiopie par un couple français à l’âge de 5 ans, spécialiste de l’enfance en crise identitaire et fondatrice de l’association « Des Racines Naissent des Ailes», nous présente son nouveau livre, basé sur son expérience d’accompagnement dans le cadre de la recherche d’origines. Elle guide les personnes concernées à travers une préparation minutieuse en plusieurs phases.



Phase 1 : Étude de la demande et approche systémique 

Pour que cette quête soit bénéfique pour la personne adoptée, il est essentiel qu’elle comprenne ce qui déclenche son questionnement et intègre le pourquoi de ce voyage ou de ce contact avec sa famille biologique. Les niveaux de réflexion sont différents selon
l’âge et le parcours des personnes, aussi une préparation sur mesure est
nécessaire. Cette préparation commence donc par l’étude de la demande de la personne adoptée afin de préciser son attente, « ré-ajustable » au fil de son parcours. La famille et/ou le compagnon sont sollicités pour pouvoir mener un travail sur le système familial. Ensemble, ils survolent par le biais d’outils interactifs leur filiation adoptive afin de prendre conscience et parfois connaissance des liens qui les unissent. La personne adoptée et sa famille échangent et réfléchissent ainsi sur leur apport respectif dans la construction du lien familial. C’est souvent l’occasion d’exprimer et d’aplanir les incompréhensions et malentendus, et de permettre à la famille et à la personne adoptée, d’analyser leurs peurs respectives liées au projet de voyage. L’approche systémique aide en général la personne adoptée à formuler cette quête à son entourage comme une continuation logique de son parcours de vie et non un désaveu de son adoption. 
Lorsque les personnes adoptées sont en rupture totale avec leur famille adoptive ou ne souhaitent pas l’impliquer pour divers motifs, nous leur expliquons pourquoi nous recommandons ce travail familial et insistons sur l’importance d’être entouré de personnes de confiance dans ce projet. Pour gérer les tensions lors de ces entretiens, nous faisons appel à des outils ludiques qui invitent chaque partie à se remettre en question. 
Phase 2 : Le projet de voyage 
Au cours de cette phase, la personne adoptée définit si elle souhaite effectuer un simple voyage touristique, un voyage immersion ou encore un voyage destiné à retrouver sa famille biologique. Tout est détaillé : la gestion par la personne adoptée du planning de ses retrouvailles, les personnes visées, les questions qu’elle souhaite poser, etc. Chaque élément est soumis à une réflexion sur sa raison d’être, la gestion des 
émotions auxquelles il va donner lieu par exemple en cas d’impossibilité ou refus de rencontre. Ces étapes ne seront peut-être pas suivies à la lettre mais elles contribuent à diminuer le stress de la personne adoptée au moment crucial. 
En parallèle, des ateliers culturels sont proposés sur les coutumes du pays d’origine avec en outre une initiation linguistique. La question des attentes des familles biologiques et des liens à entretenir est abordée et des notions de géopolitique sont transmises pour comprendre le contexte de vie de ces familles. Lors de son voyage, la personne adoptée est prise en charge par la personne qui l’a accompagnée ou par celle qui a effectué l’enquête. Lors de ces ateliers, l’équipe des accompagnants se concerte afin de partager leurs différentes visions du travail à mener et du cheminement respectif de la personne adoptée et de son entourage. La reformulation constante des propos des diverses parties permet de dissiper les malentendus et faire émerger le positif de ce vécu 
adoptif. 

Apporter une réponse concrète et s’approprier le lendemain


À son retour, nous aidons la personne adoptée à restituer son vécu et extraire les points positifs perçus dans cette culture d’origine afin qu’elle devienne une force dans sa vie quotidienne. De nombreuses personnes reviennent avec une nouvelle énergie et créativité, l’occasion de poser sur papier les grandes lignes des projets de vie émergeants. Nous aidons les personnes adoptées à faire accepter leur nouvelle perception d’elle- même à leur entourage et les encourageons dans ce changement. Il s’agit d’un accompagnement de bout en bout (de 10 mois minimum) jusqu’au repositionnement multiculturalité de l’adopté

dans sa vie.

En général une quête des origines bien préparée constitue une sorte de rite de passage permettant à la personne adoptée de reprendre en main son passé. C’est une découverte et une acceptation de sa différence afin de lui donner une valeur positive. Bien sûr il y a d’autres façons de reconstruire son estime de soi et de reprendre sa vie en main mais toutes passent par une acceptation de son vécu et par conséquence de soi dans sa différence.




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